64ème congrès de la FNI : la permanence des soins au coeur des débats

La Fédération Nationale des Infirmiers (FNI) réunit ses cadres à la Réunion du 4 au 6 décembre, le temps de son congrès national. Celui-ci porte sur la permanence des soins et le rôle que sont appelées à y prendre les IDEL. Un sujet d’actualité, alors que la ministre de la Santé vient de sonner la mobilisation générale du secteur des soins de ville pour désengorger les urgences hospitalières.
Philippe TISSERAND, Président de la FNI, a prononcé un discours d’ouverture offensif et prospectif pour l’avenir de la profession.

Madame la Ministre,
Monsieur le Sénateur,
Mesdames les Présidentes, Messieurs les Présidents,
Mes cher(e)s Collègues,
Mesdames, Messieurs,
C’est un immense plaisir pour la FNI de faire escale, le temps de notre 64ème congrès national, sur votre belle île de La Réunion. C’est une première qui nous permet de joindre l’utile à l’agréable, mais surtout de démontrer tout le soutien que nous souhaitons apporter à la jeune et dynamique équipe syndicale FNI de La Réunion.
Je le réaffirme haut et fort, l’itinérance de nos grands évènements nationaux a aussi pour but de mettre à l’honneur et de fortifier l’action de nos représentants locaux sur l’ensemble du territoire, y compris outre-mer. La continuité territoriale a du sens pour la FNI, de même que la continuité des soins a du sens pour les infirmières libérales !
C’est d’abord parce qu’il y a des syndicats départementaux et régionaux qu’il y a une fédération nationale. Et plus que jamais, dans les réformes de notre système de santé en cours, où les territoires prennent une place de plus en plus grande, nos syndicats départementaux et régionaux sont notre force au service des infirmières libérales et au plus près de nos patients !
Et puisque nous sommes outre-mer, je ne voudrais pas ouvrir ce congrès sans avoir une pensée chaleureuse et confraternelle en direction d’autres îles, celles de la Caraïbe récemment sinistrées après le passage du terrible ouragan Irma. Je sais que les choses s’améliorent, mais pas assez vite. Je sais aussi tout le dévouement de nos consœurs et confrères sur place, au service de la santé des populations locales. Nous leur avons exprimé et manifesté notre solidarité. Nous devons rendre un hommage à leur action en faveur des populations sinistrées, qui fait honneur à notre profession.

Cet épisode montre que la vie des îles n’est pas aussi idyllique que certains l’imaginent ou voudraient le faire croire. En dehors des épisodes où les éléments se déchaînent, la situation sanitaire des populations et leur condition sociale conduisent à des conditions qui diffèrent très sensiblement de celles de la métropole.

Pour autant, nos responsables politiques ou d’administration centrale se font tirer l’oreille pour participer à un congrès national hors métropole. Je ne vous cache pas que l’organisation du congrès, cette année, n’a pas été simple. Non seulement faire sortir nos dirigeants hors de leurs bureaux parisiens est une épreuve, mais celle-ci s’est transformée en véritable course d’obstacles parce que la date de notre congrès coïncide avec celle de la fin d’examen du PLFSS par le Parlement. Ni la Ministre de la Santé, ni les représentants de la Direction générale de l’organisation des soins, ni ceux de l’Assurance maladie ne seront des nôtres, je le comprends autant que je le regrette.

Ceci donne encore plus de prix aux intervenants ici présents, et qui ont perçu les enjeux. Je les en remercie d’autant plus et je vous remercie d’applaudir en particulier :

  • le professeur Corinne VONS, présidente de l’association française de chirurgie ambulatoire ;
  • Frédéric BIZARD, économiste spécialiste sur les questions de protection sociale et de santé ;
  • Giancarlo BAILLET, qui représente la FEHAP ;
  • Sylvie JOUVE, Médecin Colonelle, chef du service de santé et chef du département des formations de santé de l’École Nationale Supérieure des Officiers Sapeurs-Pompiers.

Je remercie également les acteurs locaux qui ont répondus à notre sollicitation :

  • Monsieur Michel DENNEMONT, sénateur de la Réunion,
  • Ruber VEERAPEN, président de Gecoplaies,
  • Christine KOWALCZYCK, présente de l’URPS médecins Océan indien,
  • Éric WAGNER, président de l’URPS kiné Océan indien.

A l’occasion de ce 64ème congrès national de la FNI, et à l’heure ou nos compétences sont convoitées par d’autres– les pharmaciens, pour ne pas les nommer – la FNI a pris le parti de démontrer à quel point il conviendrait au contraire de mobiliser les compétences infirmières dans toutes leurs dimensions.
Nos compétences, notre organisation, nous permettent de prendre en charge les sorties d’hospitalisation, le plus souvent de manière non anticipée. Sur la base du maillage territorial infirmier que nous avons su préserver et de l’organisation des cabinets infirmiers, pourquoi ne pourrions-nous pas prendre une place plus importante dans la prise en charge des soins non programmés, de l’urgence et de la permanence des soins ?

Cette idée n’est pas sortie du chapeau de nos cadres fédéraux un beau matin. Elle émane des propositions du terrain, qui avaient émergé dans les 60 idées du 60éme congrès de la FNI, idées en partie reprises l’an dernier dans notre plateforme 2017/2022 à l’occasion de la campagne présidentielle.
Les urgences hospitalières sont saturées ! Elles coûtent cher ! Près de la moitié des consultations qui s’y déroulent ne relèvent pas d’un recours aux urgences. En d’autres termes, près d’un patient sur deux qui se rend aux urgences n’a strictement rien à y faire, mais à défaut de réponse disponible en ville, ils y vont. Les conditions de la permanence des soins se sont dégradées dans les territoires en raison de la pénurie médicale. Par ailleurs, les jeunes médecins libéraux, pour réduire leur amplitude hebdomadaire de travail, limitent au maximum leur participation à cette permanence en oubliant au passage que l’exercice des professions libérales s’apparente à une mission de service public.

Face à ce constat, on observe que les infirmières libérales, pour répondre à leur obligation d’assurer la continuité des soins, se sont organisées spontanément pour assurer 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24 la prise en charge des patients. La FNI propose de s’appuyer sur cette organisation et de mobiliser pleinement les compétences infirmières pour nous associer aux activités de PDS. Dans une situation aussi dégradée est-il raisonnable de faire l’économie de la réflexion qui pourrait conduire à mobiliser les infirmières libérales pour réduire le nombre des passages aux urgences, en répondant plus rapidement à la demande des patients, en appuis, voire en relai dans certaines situations des médecins généralistes.

Les infirmières libérales bénéficiant obligatoirement d’une expérience en soins généraux et prêtes à conquérir une position nouvelle et stratégique dans l’organisation des soins.
C’est cette question que la FNI a choisi de porter à la réflexion des décideurs en santé à l’occasion de son congrès annuel.
Un nouveau contexte politique, même si la loi Touraine s’applique, devrait être de nature à renouer le dialogue.
Si l’installation du nouveau gouvernement marque indiscutablement une volonté d’ouverture et de dialogue, la trajectoire initiée sous la précédente mandature reste cependant très prégnante.

Vous l’avez constaté : les ARS poussent les acteurs locaux à mettre en application les structures conçues par Madame TOURAINE. Les groupements hospitaliers de territoires (GHT), d’un côté, pour regrouper les hôpitaux entre eux. Les communautés professionnelles territoriales de soins (CPTS) de l’autre, pour rassembler les acteurs du monde des soins de ville libéraux.

Au final, les enjeux de pouvoirs des uns sur les autres risquent de prendre le pas sur l’efficience de l’organisation des soins. Il suffit pour s’en convaincre d’observer avec quelle appétence les syndicats médicaux, une fois de plus, sont à la manœuvre, tant au plan régional que national pour s’accaparer la gouvernance de la future Fédération nationale des CPTS.

Au-delà de l’exercice partiel unanimement contesté, la loi Touraine a ouvert la voie du déclassement des professions en distribuant des parcelles de compétences infirmières aux pharmaciens, sous couvert d’amélioration de la couverture vaccinale de la population sur les bases de données tronquées. Le langage des chiffres est comme le langage des fleurs, on lui fait dire ce que l’on veut !
Pour couronner le tout, on observe par ailleurs que l’Assurance maladie prépare un des projets qu’elle avait échoué à mettre en œuvre l’an dernier : le paiement à l’épisode de soins. En deux mots, le paiement à l’acte s’efface, au profit d’une enveloppe globale destinée à rémunérer l’ensemble des acteurs impliqués dans un épisode de soins, de l’hôpital à la ville. L’histoire ne dit pas qui gère l’enveloppe, ni à quelle hauteur seront rémunérés les acteurs et dans quel cadre. Certains syndicats médicaux y voient déjà le moyen d’asservir les paramédicaux. Mais, aveuglés qu’ils sont à asseoir leur domination, ils ne voient pas qu’eux-mêmes seront dominés par les établissements de soins qui, mieux organisés qu’eux, prendront la main sur la gestion de l’enveloppe budgétaire.

En revanche, il faut saluer – et cela est positif – la promesse respectée de la nouvelle équipe gouvernementale d’avoir rehaussé le niveau de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie à +2,3 % sur la durée du quinquennat. Nous n’en pouvions plus du véritable racket sur le dos des professionnels de santé, imposé à coups d’économies, année après année, par le précédent gouvernement. Il y a un moment où à force de rogner, on arrive à l’os !

Nos déboires conventionnels découlent directement de cette situation, notre négociation intervenant après celle des médecins, il ne reste aucune marge de manœuvre pour envisager sereinement des revalorisations à hauteur de nos attentes. Rappelons ici que 46% de notre activité, le rôle propre infirmier, est rémunéré à un tarif conventionnel inférieur au tarif horaires chargé d’une auxiliaire de vie et sur la base de la seule notion de temps passé !

La perspective d’un ONDAM desserré en 2018, et l’agilité dont nous avons fait preuve avec l’Assurance maladie, en repoussant à 2018 – avec un calendrier précis – la perspective de nos négociations, va redonner de l’oxygène pour financer la mise en œuvre de la généralisation du BSI corrélée au développement d’une nouvelle nomenclature dans une logique de redynamisation des tarifs.

De même, le PLFSS 2018 contient des avancées utiles, qui vont permettre de lever les obstacles au développement de l’innovation organisationnelle dans les territoires, et nous permettre de développer des initiatives de terrain en faveur des infirmières libérales pour le bien des patients que nous avons en charge. Avec le projet INZEE.CARE (https://inzee.care) la FNI entend favoriser l’organisation de la réponse libérale en sortie d’hospitalisation. Mais d’autres solutions vont pouvoir être développées, notamment celle concernant l’amélioration de l’observance thérapeutique, dans le cadre de la PDA, avec l’application spécifique que nous sommes en train de développer avec MÉDISSIMO, le tout encadré par une démarche qualité que la FNI a courageusement initiée.

Au total, après six mois de changement de gouvernance, nous assistons à une forme de continuité, et en même temps, comme dirait le chef de l’État, à des avancées nouvelles !

C’est pourquoi nous devons rester mobilisés, et surtout continuer à être force de proposition. Les nouveaux acteurs de la politique sont pragmatiques. Il nous faut agir pour les convaincre. C’est ce que nous faisons au quotidien avec nos patients. Alors agissons et mobilisons-nous. La FNI est porteuse d’initiatives et de propositions rapidement opérationnelles pour permettre à notre belle profession de construire son avenir en défendant l’initiative libérale et la qualité des soins infirmiers.

Je vous remercie.
Philippe Tisserand
Président de la FNI

 

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